Oui, écrit comme cela, c’est cela peut paraître bizarre.
Et pourtant, dans de nombreuses traditions anciennes(1) célébrer les défunts, leur accorder une place particulière et plus présente certains jours, est tout à fait normal.
Il est devenu très à la « mode » de (re)parler de la tradition celtique et donc de la fête de Samain qui se déroule ce 31 octobre. Mais d’où vient cette fête-rituel, quelle en est sa raison initiale ? Je vous cite ici la définition de cette fête issue du livre de Viviane Le Moullec :
Samain = Sam – Hain est composé de 2 éléments.
Le 1er Sam, vient de « Samm » qui signifie charge (qu’on assume) voire même fardeau.
Le 2nd, Hain (transcription actuelle) peut venir de 3 termes :
- Hael = noble, généreux
- Hadeg = semence
- Hande = persécution
Samain peut donc vouloir dire :
- noble charge, noble travail que maintenir une porte ouverte entre les trépassés et nous,
- Ensemencement (assumer de semer). C’est un très bon point de vue que de considérer que nos 2 mondes s’enseignent l’un l’autre pour s’enrichir réciproquement,
- fardeau de la persécution…..pour ceux qui ont mauvaise conscience.
A Samain, s’ouvre les portes entre le monde des morts et celui des vivants. Le voile devient plus fin et les morts se rapprochent des vivants. Samain ne peut exister sans Beltaine qui est fêtée dans la nuit du 30 avril au 1er mai. Là, c’est le monde des vivants qui se rapproche de celui des défunts.
Cette fête permettait simplement de fêter les Esprits. Le votre, ou le mien, ou/et celui d’un parent décédé. Tout comme de conscientiser que le monde des esprits des vivants et celui des morts ne forment qu’un.
En Chine, jusque dans les années 80, 1 pièce était souvent réservée au sein de la maison pour les défunts(2). Un autel s’y trouvait avec les photos des défunts et différentes statuettes. Des offrandes de nourriture y étaient régulièrement déposées ainsi qu’argent factice et alcool de riz à certaines occasions. Le nouvel an ou fête du printemps est toujours l’occasion de les honorer.
Et c’est en avril (lors de la 3e lunaison plus précisément) lors de la fête de Qing Ming (ou Ching Ming) que les tombes sont nettoyées et que d’autres offrandes y sont déposées.
Dans nos contrées, nous (souvent les personnes les plus âgées de la famille) portons des fleurs aux défunts afin de les honorer lors de cette fête de la Toussaint devenue catholique.
Tous ces rites peuvent nous paraître bien folkloriques et éloignés de nos vies actuelles.
Pourtant, ils sont le moyen le plus conscient de maintenir le lien avec nos ancêtres, avec les défunts aimés.
C’est aussi recréer le lien avec une transmission immatérielle (et totalement invisible) : celle des forces transmises par nos aïeux au moment de notre naissance.
Car dans la tradition chinoise, être enraciné (bien ancré) c’est (re)connaître ses racines familiales et prendre sa place dans la lignée. Ce qu’un travail en psychogénéalogie peut faire d’une autre manière.
Honorer nos ancêtres, porter des fleurs aux défunts aimés, c’est leur laisser la possibilité de rester en contact avec nous à travers un signe, une synchronicité. Les laisser nous guider ou nous transmettre des forces insoupçonnées à un moment précis à condition d’avoir identifié au préalable le lien qui nous relie.
C’est ouvrir une porte au possible, même si nous ne pouvons pas tout expliquer rationnellement.
C’est leur dire que nous les aimons simplement.
Si cela vous parle, porter des fleurs sur une tombe est une solution si vous en avez la possibilité.
Mais vous pouvez aussi reprendre le rite païen de Samain : creusez une citrouille (3) si le coeur vous en dit et allumez une bougie à l’intérieur la nuit du 31 octobre.
Ou allumez simplement une ou plusieurs bougies pour vos défunts posées éventuellement devant leurs photos. N’ayez pas peur d’expliquer tout cela aux enfants, au contraire !
Aujourd’hui, nous fuyons la mort et tout ce qui s’y rapporte est caché, tût. Cela peut être l’occasion de raconter de bons souvenirs et autres anecdotes liées à ceux qui nous ont quittés.
Les mets du repas du soir de Samain étaient aussi en lien avec ce que donne la nature à cette période. Une soupe (de citrouille !), des châtaignes en accompagnement d’une viande blanche et du raisin pour le dessert. Sans oublier de porter un ou plusieurs toasts (avec modération…) à la santé de vos ancêtres.
Dans la mesure du possible, et en prenant la sécurité nécessaire, laisser brûler les bougies jusqu’à ce qu’elles s’éteignent d’elles-mêmes.
Et n’oubliez pas de remercier la Terre pour tout ce qu’elle vous/nous donne.
Lors du petit déjeuner le lendemain, chacun pourra raconter ses rêves dont on dit qu’ils sont le témoignage de la visite d’un ancêtre et porteur d’un conseil.
Finalement, célébrer vos ancêtres, c’est célébrer la vie !
NB : Et Halloween dans tout ça ? Le mot vient de la langue anglaise : All Hallows Eve (la veille de tous les saints) bien loin de ce que le monde du marketing en a fait ! Samain pour les Celtes, All Hallows Eve pour les anglais…
Sources :
1.Madagascar, Corée du Sud, Chine, Mexique ou encore Viet-Nam. Consulter Wikipédia l »es ancêtres » pour de plus amples informations.
2.la lecture de cet essai : où sont passés les ancêtres ? Morts et vivants dans une famille chinoise d’aujourd’hui est vraiment intéressante.
3.Pourquoi une citrouille ? Selon Viviane Le Moullec, la citrouille représente une belle coutume d’autrefois. Un esprit quand il ne prend pas forme humaine, a une forme de boule bien ronde. Quand il crée de l’énergie pour réchauffer le coeur des gens, il prend une belle teinte orangée. Alors il ressemble à une citrouille avec des yeux brillants et une bouche pour parler, rre et partager la joie.
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